Par Caroline Beyer Mis à jour du Figaro, le 24/03/2014 >>>
Trois chercheurs ont étudié le
temps réellement consacré aux apprentissages fondamentaux à l'école. Ils
dénoncent le caractère «factice» de certaines «occupations» et
critiquent la réforme des rythmes scolaires.
«Sept minutes pour apprendre à lire : à la
recherche du temps perdu.» C'est sous ce titre un brin provocateur que
trois chercheurs français livrent leur enquête sur la question du temps
scolaire réellement utilisé par l'élève.
Ce chiffre - 7 minutes -, pour le moins dérisoire, recouvre le temps quotidiennement consacré en classe de CP à l'«automatisation du code alphabétique», compétence déterminante dans l'apprentissage de la lecture. Il prend en compte le temps où l'élève est «réellement productif». «Temps qui, pour les élèves en difficulté, se réduit à l'interaction directe entre un élève et son enseignant», précise Bruno Suchaut, coauteur de l'étude. Des moments qui ne peuvent être que rares dans des classes comptant 25 élèves. «Plus du double serait nécessaire pour aborder la lecture dans de bonnes conditions», poursuit le chercheur.
Au bout du compte, ces sept minutes quotidiennes ne représentent que 2% du temps scolaire! Au-delà de ces chiffres chocs, l'enquête s'intéresse au «temps effectif d'apprentissage de l'élève». Et pour arriver à ce temps, il convient de déduire de la durée officielle d'enseignement - 870 heures annuelles à l'école primaire - les absences des enseignants (2% du temps) et des élèves (environ 5%) ou encore la gestion du collectif. Sur ce dernier point, l'enquête reprend les conclusions d'un rapport de l'Éducation nationale de 2011 sur la maternelle relevant «le caractère factice de certaines occupations qui meublent le temps scolaire sans profit réel».
Dans sa recherche du temps perdu, l'enquête s'intéresse également à l'optimisation du temps. «Les occasions d'apprendre doivent intervenir au moment opportun, et les apprentissages visés doivent cibler les compétences opportunes», posent les chercheurs qui portent, de fait, un regard critique sur la politique éducative actuellement menée. «Ce n'est pas une question de moyens», résume Bruno Suchaut, évoquant les 60.000 postes promis durant le quinquennat Hollande pour l'éducation. Au passage, la réforme des rythmes en prend pour son grade. «Telle qu'elle est mise en place, cette réforme impacte le temps périscolaire, mais n'influe pas sur les pratiques pédagogiques», estime le chercheur pour qui le milliard d'euros déboursé par l'État pour les nouveaux rythmes aurait pu aller à un dédoublement des classes en CP, à la généralisation du travail en petits groupes ou à une augmentation salariale des enseignants.
Enfin, la formation des enseignants aborde insuffisamment selon lui cette question de l'optimisation du temps.
«Tout cela relève d'un choix de politique éducative qui doit, au-delà des débats idéologiques, se baser principalement sur les conclusions des recherches validées par la communauté scientifique internationale», conclut l'enquête. «Les responsables politiques ne semblent pas faire la différence entre la vraie recherche et les gens qui émettent des idées sur la question éducative», regrette clairement Bruno Suchaut.
Aujourd'hui basé en Suisse, où il est rattaché à l'unité de recherche sur le pilotage des systèmes pédagogiques (URSP) - l'équivalent en France de la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) -, le chercheur pointe «le mythe de l'égalité républicaine qui, en voulant offrir la même chose à tout le monde, ne va pas dans le sens de l'équité. La réforme des rythmes qui impose les mêmes contraintes partout est de ce point de vue éloquente».
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ÉVOLUTION DES HORAIRES DE FRANÇAIS (SAUV.NET) >>>
Ce chiffre - 7 minutes -, pour le moins dérisoire, recouvre le temps quotidiennement consacré en classe de CP à l'«automatisation du code alphabétique», compétence déterminante dans l'apprentissage de la lecture. Il prend en compte le temps où l'élève est «réellement productif». «Temps qui, pour les élèves en difficulté, se réduit à l'interaction directe entre un élève et son enseignant», précise Bruno Suchaut, coauteur de l'étude. Des moments qui ne peuvent être que rares dans des classes comptant 25 élèves. «Plus du double serait nécessaire pour aborder la lecture dans de bonnes conditions», poursuit le chercheur.
Au bout du compte, ces sept minutes quotidiennes ne représentent que 2% du temps scolaire! Au-delà de ces chiffres chocs, l'enquête s'intéresse au «temps effectif d'apprentissage de l'élève». Et pour arriver à ce temps, il convient de déduire de la durée officielle d'enseignement - 870 heures annuelles à l'école primaire - les absences des enseignants (2% du temps) et des élèves (environ 5%) ou encore la gestion du collectif. Sur ce dernier point, l'enquête reprend les conclusions d'un rapport de l'Éducation nationale de 2011 sur la maternelle relevant «le caractère factice de certaines occupations qui meublent le temps scolaire sans profit réel».
Un regard critique sur la politique éducative
«À l'école primaire, le nombre d'heures a baissé de 500 heures par an en un siècle», ajoute Bruno Suchaut, qui évoque parallèlement une diminution du temps dédié aux matières fondamentales, au profit de nouvelles disciplines «comme le numérique, les langues vivantes, l'éducation à la santé, au développement durable»…Dans sa recherche du temps perdu, l'enquête s'intéresse également à l'optimisation du temps. «Les occasions d'apprendre doivent intervenir au moment opportun, et les apprentissages visés doivent cibler les compétences opportunes», posent les chercheurs qui portent, de fait, un regard critique sur la politique éducative actuellement menée. «Ce n'est pas une question de moyens», résume Bruno Suchaut, évoquant les 60.000 postes promis durant le quinquennat Hollande pour l'éducation. Au passage, la réforme des rythmes en prend pour son grade. «Telle qu'elle est mise en place, cette réforme impacte le temps périscolaire, mais n'influe pas sur les pratiques pédagogiques», estime le chercheur pour qui le milliard d'euros déboursé par l'État pour les nouveaux rythmes aurait pu aller à un dédoublement des classes en CP, à la généralisation du travail en petits groupes ou à une augmentation salariale des enseignants.
Enfin, la formation des enseignants aborde insuffisamment selon lui cette question de l'optimisation du temps.
«Tout cela relève d'un choix de politique éducative qui doit, au-delà des débats idéologiques, se baser principalement sur les conclusions des recherches validées par la communauté scientifique internationale», conclut l'enquête. «Les responsables politiques ne semblent pas faire la différence entre la vraie recherche et les gens qui émettent des idées sur la question éducative», regrette clairement Bruno Suchaut.
Aujourd'hui basé en Suisse, où il est rattaché à l'unité de recherche sur le pilotage des systèmes pédagogiques (URSP) - l'équivalent en France de la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) -, le chercheur pointe «le mythe de l'égalité républicaine qui, en voulant offrir la même chose à tout le monde, ne va pas dans le sens de l'équité. La réforme des rythmes qui impose les mêmes contraintes partout est de ce point de vue éloquente».
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