Par Robin Guilloux
Professeur certifié de
Lettres, titulaire d'une maîtrise d'enseignement en philosophie, je suis
actuellement à la retraite de l'Education nationale depuis 2010.
J'ai été professeur de Français et de Philosophie dans
l'enseignement privé sous contrat, puis de Français dans l'enseignement
public, après l'obtention du CAPES de Lettres.
Je ne me fais aucune
illusion sur l'efficacité de mon témoignage qui recouvre une période de
plus de trente ans sur tous les niveaux (collège, lycée, lycée
professionnel), aussi bien dans des "lycées chics" de centre-ville (à
Lyon), que dans des collèges de banlieue classés ZEP (zone d'éducation
prioritaire pour les non-initiés).
Personne
n'écoute les personnels de terrain et surtout pas les technocrates
"progressistes" de la rue de Grenelle (le ministère de l'Éducation
nationale).
Mais je commence à me faire vieux (65 ans, dont plus de
trente à blanchir sous le harnais de l'Education nationale) et j'ai
besoin de parler (et si sum "vox clamantis in deserto"),
d'autant que je ne suis plus soumis à l'obligation de réserve et que je
ne risque plus rien (sous les apparences du pays des Bisounours, l'Éducation nationale est un système totalitaire et il faut veiller à rester dans le politiquement correct).
Pendant trente ans, année après année, j'ai assisté à la
destruction progressive de l'École de la République. Le processus
a commencé avec la Réforme Haby en 1975 (je faisais encore mes études
universitaires) et s'est poursuivi sous le prétexte trompeur de la
"démocratisation de l'École".
Les "crans d'arrêt" ou, si l'on préfère, les garde-fous mis
en place par la Réforme contre le "collège unique" : orientation après
la cinquième, CPPN, 4ème et 3ème technologiques, redoublements, etc. ont
été peu à peu supprimés par les gouvernement successifs de Gauche comme
de Droite, mais avec une nette accélération à partir des années 90 et
la Loi d'orientation de 89, dite, "Loi Jospin", qui a mis, comme on le
sait, l'élève "au centre du système éducatif".
Ces réformes successives, appuyées par la pression du lobby
pédagogiste piloté par l'inénarrable Philippe Meirieu (bien creusé,
vieille taupe !) ont abouti à la situation catastrophique que nous
connaissons aujourd'hui : 30 % d'élèves qui entrent en 6ème sans savoir
lire et écrire correctement et qui ne possèdent pas les bases
nécessaires pour effectuer un raisonnement mathématique et un collège
qui ne parvient plus à combler les lacunes abyssales des élèves et dont
nos responsables politiques ont décidé de "jeter l'éponge" en les
transformant en "lieu de vie".
Devant cette situation,
n'importe quelle personne sensée se poserait la question de
l'efficacité des méthodes d'enseignement utilisées (à de rares
exceptions près) à l'école primaire : méthode globale, observation
réfléchie de la langue substituée à la grammaire traditionnelle, cours
de vocabulaire réduits à la portion congrue, suppression du "par cœur",
multiplication des "sorties éducatives", introduction massive de
l'informatique, de l'éducation à la citoyenneté, de l'éducation au tri
des déchets ménagers et de toutes sortes de belles choses (j'en passe et
des meilleures) dont je me garderais bien de nier l'utilité (ah ! le
critère de '"l'utilité" !), mais qui ont eu une fâcheuse tendance à se
substituer à la transmission des savoirs, les instituteurs (pardon, les
"Professeurs des Écoles") ayant été sommés de se métamorphoser en
gentils moniteurs de colonie de vacances.
Mais les technocrates de la rue de Grenelle (comme tous les
technocrates du monde, par exemple ceux de Bruxelles) sont tout sauf des
gens sensés et obéissent à une logique particulière : le collège
français ne marche pas parce qu'il y a encore trop de transmission et
"d'enseignements frontaux" et pas assez de "pédagogie progressiste",
variante de : "le communisme ne marche pas parce qu'il n'y pas assez de
communisme !" ou "l'Europe ne marche pas parce qu'il n'y a pas assez
d'Europe !"
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